L’impression 3D à l’INRIA Lille, le nouvel atout de la recherche (interview)

Ingénieur pluridisciplinaire, Mario Sanz Lopez maîtrise aussi bien la robotique et la conception de capteurs et d’interfaces, que la réalisation de prototypes. Membre de l’équipe-projet Shacra d’Inria Lille – Nord Europe, il met aujourd’hui son talent au service de la modélisation médicale, à l’aide d’un outil en plein essor : l’imprimante 3D.

Pourquoi avoir choisi l’imprimante 3D comme outil de travail au quotidien ?

Dans mon équipe, dédiée à la simulation médicale numérique, l’utilisation de l’impression 3D présente de nombreux avantages. Sa simplicité d’utilisation ainsi que son efficacité permettent de passer d’un concept 3D à un objet en silicone en quelques heures. L’imprimante que j’utilise coûte environ 1 000 euros, un investissement très rentable au regard des nombreuses possibilités qu’elle offre en matière de simulation médicale.

Quels projets avez-vous récemment mené à bien à l’aide de l’impression 3D ?

Nous avons terminé un projet de recherche visant à repérer des tumeurs et le réseau vasculaire du foie lors d’une laparoscopie abdominale*, grâce à la réalité augmentée**. Lors de cette opération, le chirurgien est souvent amené à effectuer des déformations très importantes sur les organes, et il lui est ensuite très difficile de se repérer et de retrouver les tumeurs ou même le réseau vasculaire, d’autant plus qu’il ne dispose que d’une vision réduite de l’organe. Dans ce cadre, nous avons construit un système mécanique capable de reproduire les différentes déformations subies par le foie, pour ensuite pouvoir évaluer avec précision l’emplacement virtuel des tumeurs. Nous avons utilisé l’impression 3D pour réaliser le foie, ainsi que pour produire les différents systèmes mécaniques qui permettent de simuler les effets d’une laparoscopie sur cet organe. Le choix de cette méthode de fabrication n’avait rien d’anodin, car en « imprimant » des pièces en plastique sur-mesure, nous avons ainsi pu observer les mouvements à l’intérieur du foie aux rayons X, ce qui n’aurait pas été possible avec des pièces métalliques. Notre système a fait preuve d’une très grande précision, avec une marge d’erreur inférieure à 4 mm. Il contribuera très fortement à l’amélioration du déroulement de futures opérations, pour le plus grand bénéfice des patients.

L’impression 3D va-t-elle se démocratiser dans la recherche ?

Personnellement, j’aime beaucoup travailler avec cet outil, à tel point que j’aurais désormais beaucoup de mal à m’en passer. Il est particulièrement utile pour les équipes qui font de la robotique ou qui sont amenées à travailler sur du prototypage. Comme l’imprimante est open source, il est possible de la modifier à volonté pour l’adapter à ses besoins. J’ai vu ainsi des ingénieurs transformer une imprimante 3D en une fraiseuse à contrôle numérique, en quelques secondes. C’est quelque chose de révolutionnaire !

Quels aspects de l’imprimante 3D mériteraient d’être améliorés ?

L’assemblage de l’imprimante ! Elle est livrée sous forme de kit à monter, un peu comme pour un meuble IKEA, mais en plus complexe. Il m’a fallu une semaine entière pour la construire. De plus, il s’agit d’un outil bruyant et encombrant, qui doit fonctionner pendant dix, douze ou parfois même vingt heures. L’imprimante 3D nécessite une surveillance constante. Le côté convivial doit encore être largement amélioré pour que les imprimantes 3D envahissent nos laboratoires et plus largement nos bureaux !

* Technique chirurgicale qui permet d’examiner l’intérieur d’un abdomen en introduisant un instrument par le biais d’incisions minimales de la paroi abdominale.
** Superposition des images de synthèse sur des images réelles.
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Biographie 

mario_sanz_imprimante3d_vignette Mario Sanz Lopez est né en 1984 à Madrid, en Espagne. Il découvre la France et la région lilloise à l’âge de 23 ans, par l’intermédiaire du programme Erasmus. Deux ans plus tard, le jeune homme effectue son premier stage au sein de l’équipe-projet Shacra d’Inria Lille – Nord Europe, pour qui il réalise des capteurs destinés à la simulation médicale. Une fois son diplôme obtenu, il intègre définitivement l’institut en 2012 en tant qu’ingénieur et devient précurseur dans l’utilisation de l’imprimante 3D comme outil de travail au quotidien.

Source INRIA

Article in english : 3D printing, a new asset for research

 

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